Lire la Lettre ouverte de décembre 2018
Chers amis de la Fondation,
L’été 2018 a été chaud à plus d’un titre : sans craindre le ridicule, Le Monde diplomatique affirmait en juillet que l’anthroposophie était une doctrine raciste et a pointé du doigt une série d’initiatives et d’institutions qui fondent leur action sur une démarche anthroposophique (1). La Fondation n’a été visée par aucune des attaques dont l’anthroposophie a été la cible, mais nous nous sommes sentis concernés. Ne serait-ce que parce qu’une des initiatives que nous avions soutenue, la création de l’école d’eurythmie Intervalles, a été la victime directe de ces attaques.
Mais exerçons la positivité et voyons le bon côté des choses : la diffusion de ces caricatures a amené des représentants d’institutions anthroposophiques à réfléchir aux possibles suites à donner à ces accusations. Plus en général, elles réveillent chacunde nous en ce qu’elles nous obligent à réfléchir ànotre propre rapport à l’anthroposophie.
Ainsi, nous souhaitons réaffirmer ici l’évidence :nous nous distancions sans ambiguïté de toute interprétation raciste de l’œuvre de Rudolf Steiner. Cette œuvre fondatrice de l’anthroposophie est, à nos yeux, basée sur le respect et l’amour de l’autre sans discrimination, engagée pour une humanité plus fraternelle dans sa diversité et vigoureusement opposée aux idéologies mortifères du racisme et du repli national. Nous nous distançons ainsi radicalement de tout individu qui défendrait des thèses racistes ou nationalistes, qu’il se réclame ou non de l’anthroposophie.
L’autre pilier de l’attaque du Monde diplomatique contre l’anthroposophie concerne le dogmatisme, que nous récusons. L’anthroposophie que nous cultivons ne consiste pas seulement en un ensemble de connaissances qu’il s’agirait d’accepter sans travail individuel, mais en une recherche d’un nouveau rapport au monde adapté à notre époque. Ce nouveau paradigme est élaboré chaque jour par tous ceux qui font face en tant qu’êtres responsables et conscients d’eux-mêmes aux enjeux actuels de la crise écologique, des injustices sociales et de la perte de sens et d’orientation intérieurs. L’expérience individuelle et la recherche sans cesse renouvelée de la compréhension des différents points de vue et de la signification de leur portée font partie intégrante de sa méthode de recherche. Une indication émanant de cette recherche, même si elle provient de Rudolf Steiner, fondateur historique de l’anthroposophie, doit être considérée comme un nouvel éclairage face auquel on doit pouvoir se positionner librement.
L’été a aussi été rude en ce qu’il nous a enlevé plusieurs personnalités qui avaient un lien à la Fondation, en premier lieu notre ancien président et président d’honneur, François Jordan. Nous lui rendons hommage dans ce numéro, dont une large partie est par ailleurs consacrée au rapport annuel 2017.
François Lusseyran, Président Jonas Lismont, Trésorier adjoint
(1) Jean-Baptiste Malet, « L’anthroposophie, discrète multinationale de l’ésotérisme», Le Monde diplomatique, juillet 2018. Remarquons que d’autres médias ont fait preuve de plus d’équilibre dans leur analyse sur l’anthroposophie, voir notamment : Guillaume Lecaplain, « L’anthroposophie est-elle une secte ? », version en ligne de Libération, 30 octobre 2018